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Griffe 

En marge, difficile de ne pas faire un lien vers ces deux beaux billets de Jean-Louis Kuffer à propos de l'œuvre dérangeant de Larry Clark, ici et . Puis, d'un champ à l'autre, retour au bercail aiguillé par cette parenthèse dans le second article, qui rappelle combien nous vivons de plus en plus au States nous-même, venons en à Depardon. Celui-ci, mis en lumière ces jours-ci pour son travail sur la France, dit comme les Américains ont beaucoup travaillé sur leur paysage (souvent exclusivement), en évoquant Robert Adams... Alors de se demander jusqu'où ceux-ci ont influencé notre regard sur le nôtre.

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Notre découragement en présence de la beauté résulte certainement de la manière dont nous avons saccagé notre pays, de notre apparente incapacité à cesser de le faire, et du fait que peu d'entre nous peuvent encore espérer posséder un bout de terre vierge. Autrement dit, ce qui nous dérange dans la beauté essentielle, c'est qu'elle n'est plus caractéristique. Les lieux non défigurés nous attristent parce qu'ils ont perdu une bonne part de leur vérité. Les paroles de consolation de Thomas Gray — «Maintes fleurs naissent pour s'épanouir en secret et perdent leur douceur loin de tout» — sont devenues ironiques : nos fleurs sont aujourd'hui comptées, clôturées.
Robert Adams, Essais sur le beau en photographie



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Pour finir, après je vais chercher les cachets, dans l'éditorial de Télérama Horizons consacré à Depardon, Catherine Portevin joue (d'une petite pique, quand même ?) en écrivant : "Désolation et vitalité ensemble : c'est la France... vue du sol !" et tente peut-être aussi de nous faire savoir que lorsqu'on ne s'appelle pas Yann-Arthus Bertrand ou Raymond Depardon, il vaudrait mieux fermer les yeux.

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L'horizon et le centre s'excluent, car l'horizon vient remplacer la vie du centre, qu'il s'agisse du centre dont la présence est demeurée cachée ou de celui qui ne s'est jamais donné à voir et appelle sans se dévoiler. Seule la perte du centre, de son sens, de son absence même, fait de l'horizon un appel majeur, une lointaine distance, une présence inaccessible. C'est seulement quand l'espérance se déchaîne que le cœur tend vers lui irrésistiblement.
María Zambrano, Notes pour une Méthode




Willem Breuker Kollektief, To Europe sur Hunger!

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